Expliquer la théorie de l’évolution avec Pokémon, c’est possible ?

 

La théorie de l’évolution, un des piliers de la biologie actuelle, est toujours soumise à de nombreuses remises en question. Beaucoup d’entre elles sont issues d’incompréhensions sur cette théorie. Pourtant, ses fondements sont relativement simples. Si simples, qu’on pourrait les expliquer avec des exemples uniquement tirés de Pokémon ?

 

Challenge accepted !

#1 Evolution ? Pokévolution ?

 

 

Il y a quelques années, alors que je n’étais qu’une petite élève de Licence en train de chercher désespérément un sujet à présenter en cours d’anglais, je suis tombée sur un échange intéressant sur un forum quelconque. En substance, voilà ce qui y était dit :

 

« Si l’évolution existe, pourquoi mon chien ne s’est-il pas encore transformé en éléphant ? » demandait un utilisateur qui se voulait sans doute sarcastique.

Ce à quoi un autre utilisateur serviable (et sans doute tout aussi sarcastique) avait répondu « Parce que ton chien n’est pas un Pokémon. »

 

Au-delà du fait que cette réplique m’a fait rire toute la soirée et m’a permis de trouver une idée pour ma présentation d’anglais, je trouve qu’elle rappelle plusieurs choses très intéressantes :

- Le concept d’évolution, c’est loin d’être clair pour tout le monde.

- L’évolution dans le monde Pokémon (la Pokévolution !) n’a rien à voir avec la théorie de l’évolution étudiée en biologie.


 

Forcément, en tant que biologiste enthousiaste ET fan invétérée de monstres de poche depuis mes plus jeunes années, il ne m’a pas fallu longtemps pour me demander si finalement on ne pouvait pas expliquer ce qui se cache derrière l’évolution (celle des biologistes, pas des dresseurs de Pocket Monsters) en utilisant des exemples tirés du monde Pokémon.

 

 

Ce que l’évolution n’est pas

 

 

Mais je pense qu’avant de m’attaquer à ce qu’est l’évolution, il faut déjà clarifier quelque chose. Non, un Chenipan qui pokévolue en Chrysacier puis en Papillusion, ou un Ptitard en Tétarte, ce n’est pas de l’évolution. C’est une métamorphose (très, très rapide), c’est-à-dire le changement de forme plus ou moins important que subit un animal au cours de son développement. Vous remarquerez d’ailleurs que je n’ai pas choisi mes exemples au hasard, car les métamorphoses sont particulièrement courantes chez les insectes et les batraciens.

 

 

La Pokévolution de Ptitard et Tétarte reprend le processus de métamorphose bien connu chez les batraciens, avec notamment la perte de la queue.


 

L’évolution, elle, n’agit pas à l’échelle d’un individu, ni à l’échelle d’une vie. Ses conséquences ont besoin de plusieurs générations pour pouvoir être révélées. Il ne s’agit donc pas non plus de pouvoir s’adapter au cours de sa vie aux caractéristiques de son milieu (là où on vit), comme peut le faire Evoli en grandissant de différentes façons (ses Pokévolutions) selon la manière dont il est élevé (je ne rentrerais pas dans les détails, mais si vous tenez à en savoir plus vous pouvez jeter un œil ici). Ce phénomène s’appelle la plasticité phénotypique. Un bien grand mot pour dire que l’individu se développera différemment en fonction du milieu dans lequel il est placé.

 

 

L’évolution, Késako ?

 

Maintenant que vous avez bien compris ce que l’évolution n’est pas, peut-être que l’on peut s’attaquer au vif du sujet : l’évolution, c’est quoi et ça marche comment ?

 

L’évolution est une théorie qui a initialement été élaborée pour expliquer la diversité des êtres vivants, comment cette diversité a changé au cours du temps, et pourquoi les êtres vivants sont-ils souvent aussi bien adaptés à leur environnement[1]. Je rappelle au passage que « théorie » ici ayant le sens d’un ensemble d’hypothèses, de connaissances vérifiées et de règles logiques visant à décrire et expliquer un phénomène, et a donc un sens bien plus fort qu’une simple hypothèse incertaine.

 

 

Une diversité de Pokémons qui change au cours du temps

 

Première étape donc, vérifier que ces trois points se retrouvent bien dans le monde Pokémon. En termes de diversité, avec les 894 « espèces »[2] des huit générations actuelles, qui sont de types et de morphologies différents, nous avons une bonne base pour discuter. On peut facilement retrouver les caractéristiques de ces « espèces » dans le Pokédex, outil indispensable de tout Pokémonologiste.

 

 

 

Un fossile d'Arkeapti tel qu'il aurait pu être extrait du sol par des Paléo-pokémonologistes. Ses os recèlent-ils les secrets du passé des Pokémons?

 

Le monde Pokémon est parsemé d’indices que les « espèces » Pokémon ne sont pas fixes au cours du temps. On trouve notamment de nombreux fossiles révélant l’existence d’espèces de Pokémons aujourd’hui disparues[3]. Ces fossiles montrent que la faune Pokémon passée était différente de la faune actuelle. De plus, certains de ces fossiles pourraient être considérés comme les « ancêtres » de certains groupes de Pokémons. Ainsi, Arkéapti et Aréopteryx sont décrits comme les premières formes de Pokémon oiseaux, présentant des ailes leur permettant tout juste de planer ou de voler. Ces fossiles sont une ressource précieuse pour comprendre l’évolution des Pokémons sur le temps long, et au-delà de la mythologie illustrée à travers les Pokémons dits « légendaires ».

 


 

Les Pokémons ne sont pas tous identiques !

 

Vous allez me dire, Bulbizarre, c’est bien gentil, mais ça ne nous dit toujours pas comment ça marche, l’évolution ! Alors quoi, les nouvelles espèces de Pokémon elles apparaissent d’un coup, par Pokémagie ? Bien sûr que non, le processus est un peu plus complexe. Mais commençons par le commencement.

 

Bien que la plupart des Pokémons d’une même espèce se ressemblent fortement, il existe des variations d’un individu à l’autre. L’exemple le plus flagrant est très certainement les rares Pokémons shinys (ou chromatiques) que l’on peut croiser de temps à autres. Il s’agit de mutations rares affectant la pigmentation du Pokémon, de la même façon que nous connaissons des animaux albinos.

 

La mutation chromatique du Pikachu est très proche du Pikachu "normal". Il est juste un peu plus foncé. Mais d'autres mutations chromatiques sont beaucoup plus flagrantes. Peut-être vous rappelerez-vous du Léviator rouge, ou du Dracaufeu noir...


Mais il existe bien d’autres indications que chaque Pokémon est un peu différent des autres de son espèce : la nature (le tempérament), la taille et le poids sont variables, et chaque individu possède des capacités intrinsèques (valeurs individuelles, ou IV) qui déterminent s’il est plutôt bon ou non en Attaque/Défense/Vitesse… par rapport à ses congénères.

 

Nous verrons dans le prochain article en quoi cette diversité de Pokémons est à l'origine même de l'évolution de ceux-ci avec le temps.



[1] Quoique quand on voit le panda dont l’appareil digestif ressemble plus à celui d’un carnivore à celui d’un mangeur de verdure, cette affirmation peut être relativisée.

[2] Terme discutable, puisque les différentes Pokévolutions d’un même Pokémon, et même les Nidorans et sont considérées comme des « espèces » différentes  

[3] A l’exception peut-être de Kabuto, qui « peut encore être trouvé dans certaines régions » et « n’a pas changé depuis 300 millions d’années » d’après le Pokédex… Mais je ne vais pas commencer à débattre de si oui ou non, ce sont bien les mêmes Kabutos que ce que l’on retrouve à l’état fossile, mes compétences de Pokémonologiste sont malheureusement trop limitées…

 

 Sources

 

Wikipédia : sur la plasticité phénotypique

 

Poképédia : pour la description des différentes formes régionales

 

Pokébip : pour les descriptions du Pokédex

 

Les sprites de Pokémons dans la bulle de l’illustration sont issus de veekun.com, mis à disposition par The Pokemon company.

Texte: Marie

Illustrations: Nicolas et Marie